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EPISODE 49 : Les courants magnétiques

 
 
 
Titre : LES AVENTURES FANTASTIQUES DE ROBERTO  
 
Dans 
« LES COURANTS MAGNETIQUES » 
49-ième épisode 
 
 
 
ROBERTO (Ecrivain - Aventurier) 
MISS MARYL (citoyenne de la terre) 
LE COMTE DE LA BOUCHE-EN-BIAIS 
SYLVESTRE (Ex facteur dans le Midi de la France) 
NICKI (le pêcheur inuit) 
L’AMIRAL BYRD 
L' ALBATROS 
LE BELOUGA (Grand cétacé marin) 
BENOÎT PICARDI (Aérostier suisse au commande de sa Montgolfière : "La Renaissance") 
 
LIEU : L'action se déroule sur un morceau de banquise à la dérive, quelque part dans la mer de Beaufort située dans l'Océan Arctique. 
 
GENRE : comédie 
 
EPISODE 49 : « LES COURANTS MAGNETIQUES » (2002) 
Deuxième partie de la pièce « Les rois de l'azur » (9 personnages) 
 
AUTEUR : Emilien CASALI 
 
PROTECTION SACD (Société des Auteurs Compositeurs Dramatiques) - dépôt d'enregistrement 
 
Contact : Emilien CASALI– (France) 
e-mail : casali-emilien1@orange.fr 
 
http://emiliencasali.populus.ch/ - http://biblioscolaire.populus.ch/ 
http://compballadins.populus.ch/ 
 
 
 
 
 
 
 
PROLOGUE 
 
SYLVESTRE, ROBERTO, MISS MARYL, NICKI,  
L”ALBATROS, BENOÎT PICARDI 
 
Peu après, l'albatros s'envole... 
 
Tout le monde se relève... 
 
NICKI 
Ca y est, les amis, il est parti ! Relevez-vous ! 
 
Nicki ramasse la canne à pêche 
 
SYLVESTRE, s'adresse à Nicki 
C'était qui ce moustique, petit ? 
 
MISS MARYL 
Le bélouga est un magnifique cétacé en voie de disparition, Sylvestre; l'on donnerait cher pour le prendre en photo. 
 
SYLVESTRE 
Eh bien, moi, je le trouve moche comme un poux ! 
 
ROBERTO, qui s'est relevé entre temps 
Où est passé Christophe Rodolphe ? 
 
NICKI 
Je crois bien que le bélouga a emporté M’sieur le Comte avec lui sous les eaux. 
 
SYLVESTRE 
Pour le manger tout cru ! 
 
NICKI 
C'est probablement le cas. 
 
SYLVESTRE 
Eh bien, je plains la digestion du pauvre moustique. 
 
ROBERTO, plonge dans les bras de Sylvestre en pleurnichant 
Oh, mon dieu ! Pauvre Comte ! Oh, mon dieu ! 
 
SYLVESTRE 
Oh, mon dieu, quel crime affreux ! 
 
MISS MARYL 
Qu'allons-nous devenir sans lui ? Oh, mon dieu, mon dieu ! 
 
ROBERTO, MISS MARYL, SYLVESTRE, ensemble 
Comme il va nous manquer ! Oh, mon dieu, mon dieu, mon dieu, mon dieu, mon dieu ! ! ! Oh, oh, oh, oh, oh !!!!!!  
 
Soudain une montgolfière surgit du ciel... 
 
BENOÎT PICARDI, à bord de la nacelle 
Attention, mesdames et messieurs, j'arrive ! Ecartez-vous du passage, je vous prie, la « Renaissance » va se poser ! 
 
La montgolfière se pose en catastrophe sur la banquise 
 
 
 
FIN DU PROLOGUE 
 
 
 
 
 
 
 
 
ACTE 1 / SCENE 1 
 
BENOÎT PICARDI, sort de la nacelle, une bouteille d'hélium à la main 
Vingt dieux ! le temps n'est pas « bonnard » par ici ! Bonsoir, tout le monde ! 
 
SYLVESTRE 
Peuchère ! J'hallucine « grave » ! Cette andouille a failli m'écrabouiller. C'est quoi ce délire ? 
 
BENOÎT PICARDI  
Désolé, mon vieux, mais je ne pouvais pas faire autrement, j'étais à court de munitions, voyez-vous ? Où sommes ­nous exactement ? 
 
SYLVESTRE 
Oh, couillon, ce n'est pas marqué cartographe sur mon front ! 
 
MISS MARYL, s'approche de Benoît 
Benoît Picardi !... Le célèbre aérostier suisse. 
 
BENOÎT PICARDI  
Mes hommages, mademoiselle. 
 
ROBERTO 
C'est sympa à vous de venir nous rendre visite en montgolfière, mon cher Benoît ! Mes amis et moi commencions à nous angoisser terriblement. 
 
BENOÎT PICARDI  
Robert du Hameau ! Vous, ici ! 
 
ROBERTO 
Roberto, pour les intimes ! (Puis) Vous savez, il n'y a pas vraiment de distraction dans l'océan arctique, hormis le chant mélodieux des bélougas et l'apparition furtive d'un albatros qui tient des propos « flippant » ! 
 
BENOÎT PICARDI  
L'océan Arctique, dites-vous ? 
 
MISS MARYL 
Comment, le grand navigateur des airs que vous êtes, l'ignorait ? 
 
BENOÎT PICARDI  
Depuis quelques temps, je n'emporte plus de cartes géographiques avec moi. 
 
ROBERTO 
Pour vous laissez aller « au gré du vent » ! 
 
BENOÎT PICARDI  
Vous avez deviné, mon cher. 
 
MISS MARYL 
Vous comptez ajouter une folie en plus à votre palmarès ? 
 
BENOÎT PICARDI  
Un nouveau challenge m'attend à bord de mon ballon que j'ai baptisé : la « Renaissance » ! 
 
MISS MARYL 
Ce qui dénote l'enthousiasme. 
 
BENOÎT PICARDI  
II y a quelques temps je décidais de prendre un nouveau départ dans ma vie... de changer de cap... 
 
SYLVESTRE 
Dites ! Surtout, ne vous dérangez pas pour nous ! 
 
 
 
MISS MARYL 
Permettez-moi de vous présenter Sylvestre et Nicki, mon cher Benoît, lesquels affrontent une dure épreuve à nos coté, ces jours-ci. 
 
BENOÎT PICARDI  
Enchanté. 
 
SYLVESTRE, lui sert la main 
Bienvenue au club, mon pote ! 
 
ROBERTO 
J'ai cru comprendre que vous étiez à cours de munitions, Benoît. 
 
BENOÎT PICARDI  
Ma bouteille d'hélium est vide. D'ailleurs, à ce propos, je dois prévenir mon associé par satellite pour qu'il m'en fasse parvenir une autre. Un instant... je suis à vous... 
 
Il dépose sa bouteille d'hélium, rentre dans la nacelle et se saisit d'un téléphone satellite 
 
 
 
FIN DE LA SCENE 1 
 
 
 
 
 
 
 
ACTE 1 / SCENE 2 
 
SYLVESTRE, ROBERTO, MISS MARYL, NICKI, BENOÎT PICARDI 
 
Nicki lance sa ligne à la mer... 
 
BENOÎT PICARDI, sort de la nacelle, un téléphone en main 
Allo, Norbert ! Allo ! Allo ! C'est toi ? Picardi à l'appareil ! Je te reçois cinq sur cinq ! Tu m'as repéré ? Très bien. Envoie-moi une recharge. Merci. Ok, je raccroche ! Tchao !(Puis) C'est super, les amis ! Dans quelques heures un avion me larguera des munitions, grâce à quoi la "Renaissance" va pouvoir re-décoller ! 
 
SYLVESTRE 
Hé, beau gosse, j'espère que tu as l'intention de nous embarquer avec  
toi ? 
 
BENOÎT PICARDI  
Je vous demande pardon ? 
 
SYLVESTRE, le prend par le col 
Tu vas tout de même pas nous mettre un bouchon, mon pote ? (Il le secoue dans tous les sens) 
 
BENOÎT PICARDI 
Lâchez-moi, Monsieur ! 
 
ROBERTO, écarte Sylvestre 
Un peu de civisme, Monsieur Sylvestre !  
 
SYLVESTRE 
Tu ne vois pas que je pète les plombs ! 
 
BENOÎT PICARDI  
Ce type ne va pas bien du tout. 
 
ROBERTO 
Mais il y a de quoi ! Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais nous sommes à la dérive, mon cher Benoît ! 
 
BENOÎT PICARDI 
Je me disais bien que quelque chose n'était pas normal. C'est vrai ! Quatre personnes sur une banquise se laissant glisser lentement sur les flots...c'est une démarche suicidaire, mes amis !  
 
ROBERTO 
Notre hélicoptère s'est craché dans l'océan ce matin. Enfin, ce serait trop long à vous expliquer. 
 
SYLVESTRE, s'agenouille et s'agrippe à son pantalon 
Sortez-nous de là, Monsieur ! Je vous en supplie ! 
 
MISS MARYL, s'agenouille et s'agrippe à son pantalon 
Sortez-nous de là ! 
 
ROBERTO, s'agenouille et s'agrippe à son pantalon 
Les courants magnétiques nous entraînent tout droit à la catastrophe, mon ami. Nous sommes fichus ! 
 
MISS MARYL, toujours agrippée à son pantalon 
Nous comptons déjà une perte dans nos rangs. Je vous en supplie, aidez-nous ! 
 
SYLVESTRE, arrache le pantalon de Benoît 
Le néant nous attend au bout de ce voyage; ne nous laisse pas tomber, mon pote ! 
 
BENOÎT PICARDI, en caleçon 
Très bien ! Je ferai le maximum pour vous sortir de là, mes frères ! C'est promis ! 
 
MISS MARYL, lui saute au cou et l'embrasse 
Vous êtes un amour, Benoît ! 
 
ROBERTO, l'embrasse à son tour 
Merci, Seigneur ! Merci Seigneur ! 
 
SYLVESTRE, l'embrasse aussi 
Tu es notre sauveur ! Tu es notre James Bond des temps modernes ! (Puis) Mais dis-moi, mon frère, tu n'aurais pas été pompier dans une autre vie, par hasard, ou alors secouriste ? 
 
BENOÎT PICARDI, écarte la main de Sylvestre) 
Pas vraiment, non. 
 
SYLVESTRE 
Ca y est ! je sais où je t'ai vu ! C'est bien toi qui as entrepris un voyage autour du monde au cours de l'année 2000 ? 
 
BENOÎT PICARDI  
C'est exact ! 
 
SYLVESTRE 
Je peux avoir un autographe, champion ?  
 
MISS MARYL 
Voyons, Sylvestre... je ne pense pas que ce soit le moment pour... 
 
SYLVESTRE 
Ok, ok, ma petite dame, je me casse ! (Il fait demi-tour) J'ai du boulot qui m'attend. Bye ! Bye ! 
Sylvestre prend la corde qui est attachée au gros cube de glace et tire dessus avec grande peine pour le faire monter sur la banquise.  
 
BENOÎT PICARDI, remonte son pantalon 
II y a tout de même un hic, mes amis ! Eh bien oui... je dispute en ce moment la course « Gordon Bennett » en solitaire, voyez-vous... 
 
ROBERTO 
Et en quoi consiste cette épreuve, du moins, si c'en est une ? 
 
SYLVESTRE, prend la parole 
Vous n 'y connaissez vraiment rien du tout à l'aérostation, Roberto ! L'origine de cette course en ballon remonte au tout début du siècle dernier, en 1906, pour être plus précis. A l'époque, on décernait une coupe au pilote du ballon qui franchissait la plus grande distance; le point de départ se situait dans le pays du vainqueur précédent. Mais comme l'aérostation dépend de la direction et de la force des vents, les résultats étaient imprévisibles. (Puis il s’adresse à Benoît Picardi) Vous m'arrêtez, cher Maître, si je me trompe. 
 
BENOÎT PICARDI  
Continuez, Sylvestre ! Vous savez si bien raconter. 
 
SYLVESTRE 
C'est qu'il en a dans la tronche l'ex-facteur ! (Puis) Eh bien, voilà, le 30 septembre 1906 eut lieu la première course, au départ de Paris; les seize ballons en lice furent emportés vers le nord-ouest, en direction de l'Angleterre. Le vainqueur fut l'américain Frank Lahm, qui se posa dans le Yorkshire, à 647 km de son point de départ. Deux autres équipages seulement avaient réussi à franchir la Manche; quant au sort des autres concurrents, ce fut le crash en pleine mer. L'année suivante, on ne s'y risqua plus guère; le départ fut alors donné de Saint-Louis, dans le Missouri, bien à l'intérieur du continent nord-américain. (Il s'adresse à Benoît) La parole est à vous, mon ami !  
 
BENOÎT PICARDI  
Après une interruption due à la Première Guerre mondiale, la course reprit en 1920. Les caprices du temps occasionnèrent bien des péripéties. En 1923, le décollage eut lieu en plein orage. Le bilan fut de cinq morts et cinq blessés. (Il fait un signe à Sylvestre) C'est encore à vous la parole, Maestro !  
 
SYLVESTRE 
Deux ans plus tard, une montgolfière heurta un train et une autre se posa sur le pont d'un navire en pleine mer. 
 
BENOÎT PICARDI  
En 1935, le départ fut donné de Varsovie et le vent emporta les équipages de tête en Union Soviétique, dans une région si écartée que l'on mit deux semaines à les retrouver.  
 
SYLVESTRE 
La dernière coupe Gordon-Bennett eut lieu en 1938, mais le record absolu de l'épreuve avait été établi en 1912 par le français Bienaimé, avec un vol de 2191 km reliant Stuttgart à un village proche de Moscou. Effarant, n'est-ce pas, mes amis ?  
 
BENOÎT PICARDI  
Merci pour votre intervention, Maestro ! Vous me fûtes d'un très grand secours. 
 
MISS MARYL 
Mais où êtes-vous allé chercher tout ça, Sylvestre ?  
 
SYLVESTRE 
Oh, vous savez, depuis que je suis en vacances, et que j'ai lâché mon métier de facteur, pour partir à l'aventure au quatre coin du globe, je ne rate pas une seule occasion pour instruire mon intellect ! (Puis il retourne à sa tâche, laquelle consiste à tirer le gros cube de glace) 
 
ROBERTO 
Si j'ai bien compris, Benoît, vous reprenez le concept de la course « Gordon-Bennett » et l'adaptez avec les techniques de notre époque. 
 
BENOÎT PICARDI  
Vous voulez rire, mon ami, la « Renaissance » est un modèle copie conforme de ceux que l'on pouvait entrapercevoir dans le ciel au début du siècle dernier. Tout là-haut, j'éprouve une sensation de joie et de liberté intense, en accord parfait avec les éléments naturels de l'Univers ! 
 
BENOÎT PICARDI, déclame un poème à haute voix 
« Sur mes cahier d'écolier, sur mon pupitre et les arbres, 
Sur le sable, sur la neige, j'écris ton nom... 
Sur toutes les pages lues, sur toutes les pages blanches, 
Pierre sang papier ou cendre, j'écris ton nom... 
Sur les images dorées, sur les armes des guerriers, 
Sur la couronne des rois, j'écris ton nom... 
 
MISS MARYL, SYLVESTRE 
Liberté !  
 
ROBERTO, poursuit 
Sur la jungle et le désert, sur les nids, sur les genêts,  
Sur l'écho de mon enfance, j'écris ton nom...  
Sur les merveilles des nuits, sur le pain blanc des journées,  
Sur les saisons fiancées, j'écris ton nom...  
Sur tous mes chiffons d'azur, sur l'étang soleil moisi,  
Sur le lac lune vivante, j'écris ton nom... 
 
SYLVESTRE, BENOÎT PICARDI 
Liberté !  
 
MISS MARYL, poursuit 
Sur les champs, sur l'horizon, sur les ailes des oiseaux,  
Et sur le moulin des ombres, j'écris ton non...  
Sur chaque bouffée d'aurore, sur la mer, sur les bateaux,  
Sur la montagne démente, j'écris ton nom...  
Sur la mousse des nuages, sur les sueurs de l'orage,  
Sur la pluie épaisse et fade, j'écris ton nom... 
 
BENOÎT PICARDI, ROBERTO 
Liberté !  
 
SYLVESTRE, poursuit 
Sur les formes scintillantes, sur les cloches des couleurs, 
Sur la vérité physique, j'écris ton nom... 
Sur les sentiers éveillés, sur les routes déployées, 
Sur les places qui débordent, j'écris ton nom... 
Sur la lampe qui s'allume, sur la lampe qui s'éteint, 
Sur mes maisons réunies, j'écris ton nom... » 
 
Paul Eluard (première partie extraite de "Liberté" - Poésie et Vérité) 
 
NICKI, tire sur sa canne à pêche 
A l'aide ! A l'aide !  
 
FIN DE LA SCENE 2 
 
 
 
 
 
 
 
ACTE 1 / SCENE 3 
 
SYLVESTRE, ROBERTO, MISS MARYL, NICKI,  
BENOÎT PICARDI, LE COMTE DE LA BOUCHE-EN-BIAIS 
 
ROBERTO 
Que se passe-t-il, Nicki ? Tu as fait une prise ? 
 
NICKI 
Cette fois-ci, c'est la bonne ! Aide-moi ! 
 
SYLVESTRE, vient à sa rescousse 
Ne laisse surtout pas le poisson s'échapper, petit, sinon je te zigouille ! Je crève de faim, tu comprends ça ? (Puis) Eh bien, qu'est-ce que tu attends pour rembobiner le moulinet ? Allez, donne-moi ça ! (Il se saisit de la canne et rembobine le moulinet) 
 
ROBERTO 
Tenez bon, Sylvestre, nous sommes à vos coté ! 
 
SYLVESTRE 
Le moulinet s'est bloqué ! Tirez sur le fils avec moi les amis ! Tout le monde tire sur le fils de pêche...  
 
Quelques secondes plus tard... 
 
SYLVESTRE 
Ca y est, nous le tenons ! 
 
NICKI 
Félicitations, M’sieur Sylvestre ! 
 
SYLVESTRE 
Tu vois, petit, ça sert à quelque chose les biceps. 
 
Le Comte est attaché au bout du fil de pêche... 
 
SYLVESTRE 
Tiens, j'ai cru voir un cadavre au bout de la ligne !?  
 
ROBERTO 
Nous allons le remonter à bord. (Il dépose le corps du Comte sur la banquise)  
 
SYLVESTRE 
Ce pauvre type est congelé. 
 
MISS MARYL 
Dieu soit loué, il est toujours vivant ! 
 
BENOÎT PICARDI, rentre rapidement dans la nacelle 
Je vais lui chercher une couverture. 
 
NICKI 
Je crois bien que c'est M’sieur le Comte ? 
 
LE COMTE, ouvre la bouche à ce moment-là 
J'ai mal entendu ? Tu veux bien répéter. 
 
NICKI 
Disons que c'est une certitude ! 
 
LE COMTE, lui tire l'oreille 
Espèce d'abruti ! Pourquoi ne m'as tu pas repêché plus tôt, puisque tu m'avais reconnu ? 
 
NICKI 
C'est qu'auparavant, je l'ignorais, M’sieur le Comte. 
 
LE COMTE 
Tu te fous de moi ou quoi ? 
 
SYLVESTRE, s'adresse au Comte 
Ca suffit, andouille ! Tu laisses le petit tranquille ou bien je te balance dans l'eau ! 
 
LE COMTE, s'agenouille devant Sylvestre et pleurniche 
Je vous en supplie, ne faites pas cela, facteur ! 
 
SYLVESTRE 
Ex facteur !  
 
BENOÎT PICARDI, sort de la nacelle avec une couverture à la main qu'il remet au Comte 
Couvrez-vous r mon pauvre ami ! (Il désigne le peignoir avec son index) Mais tout d'abord, retirez-moi ces oripeaux ! 
 
 
LE COMTE, balance la couverture 
Oripeaux dites-vous ! Oripeaux ! Figurez-vous, mon pote qu'il s'agit-là d'une pièce de collection rarissime achetée à un prix d’Or lors d'une vente aux enchères à Memphis et ayant appartenue au « King » ! Certes il est vrai que j'ai un mal fou à m'en séparer mais que voulez-vous à l'idée de savoir que le "King" a sué de toutes ses entrailles sous ce peignoir, cela me donne du "Peps" pour affronter la vie et les combats de chaque jour ! 
 
SYLVESTRE, l'assomme avec la bouteille de Champinelle 
Tu vas la fermer ta grande gueule !  
 
Le Comte gît sur le sol à présent 
 
MISS MARYL, le recouvre à l’aide de la couverture 
Contente de vous savoir en vie, Monsieur le Comte ! Et maintenant, bonne nuit ! 
 
BENOÎT PICARDI, sort de sa poche un nougat et le donne à Sylvestre 
Tenez, Sylvestre, ci est pour vous... un coupe faim. 
 
SYLVESTRE, prend le nougat 
C'est seulement maintenant que tu te radines avec ton nougat, beau gosse ? 
 
MISS MARYL, prend Sylvestre par le bras 
II se fait tard, Sylvestre.  
 
SYLVESTRE, fait demi-tour 
Je termine mon boulot et je me couche ensuite. 
Sylvestre prend la corde qui est attachée au gros cube de glace et tire dessus avec grande peine pour le faire monter sur la banquise 
 
BENOÎT PICARDI, distribue une couverture à tout le monde 
J’ai ramené d'autres couvertures avec moi, les amis ! Tenez, la nuit sera fraîche. Couvrez-vous bien ! 
 
Nicki et Roberto aide Sylvestre à remonter le cube de glace sur la banquise en tirant sur la corde... Après quoi, tout le monde s'endort sur la banquise... 
 
FIN DE LA SCENE 3 
 
 
 
 
 
 
ACTE 1 / SCENE 4 
 
SYLVESTRE, ROBERTO, MISS MARYL, NICKI,  
BENOÎT PICARDI, LE COMTE DE LA BOUCHE-EN-BIAIS 
 
Dans la nuit... 
Le vent souffle très fort et l'orage gronde... 
Tout le monde dort, sauf Roberto et Miss Maryl... 
Roberto se lève avec la couverture sur les épaules, se dirige au bord de la banquise et observe tantôt la mer et tantôt le ciel... Miss Maryl le rejoint avec la couverture sur les épaules et le prend par la main... 
 
ROBERTO, le nez pointé dans le ciel 
« Comme la nuit est lente cette nuit avec tous ces nuages qui passent si lentement malgré les vents et les orages; attendre encore l'aube et ce matin qui n'en finit plus; chaque battement de cœur, chaque doute qu'il faut vaincre et vivre une nuit sans étoiles; la nuit qu'on appelle espérance ou désespoir. Et puis d'abord une petite lueur, puis une grande lueur... peut-être le crépuscule ou l'aube quand on invoque un prénom aube ou crépuscule avant le silence qui est l'éternité ou un seul regard dont on ne peut même plus se souvenir et qu'on ne sait pas oublier; pas un brouillard mais une clarté qui vous guide dans le tumulte; une voix aussi une main aussi qu'on attend toute la nuit toutes les nuits pour dire adieu ou â jamais. » Philippe Soupault (Pôles) 
 
Puis l'orage cesse de gronder... Miss Maryl entraîne Roberto vers leur couche, puis tous deux s'allongent et s'endorment enlacés... 
FIN DE LA SCENE 4 
ACTE 1 / SCENE 5 
 
SYLVESTRE, ROBERTO, MISS MARYL, NICKI,  
BENOÎT PICARDI, LE COMTE DE LA BOUCHE-EN-BIAIS 
 
Au petit jour... 
Le ciel est gris... 
Le vent souffle légèrement... 
La mer est agitée... 
 
Sylvestre se réveille, se lève, ramasse le marteau et le burin, se dirige vers le gros cube de glace, puis, pour ne pas attirer l'attention des autres, il donne de légers coups de marteau sur le burin pour fendre le gros cube. 
 
LE COMTE, gémit dans son sommeil 
« Adieu la cour, adieu les dames, adieu les filles et les femmes ! ! Adieu vous dis pour quelques temps, adieu vos plaisants passe temps ! ! Adieu le bal, adieu la danse, adieu mesure, adieu cadence, tambourins, hautbois et violons, puisqu'à la guerre nous allons 1 !  » 
 
SYLVESTRE, s'approche de Comte lentement et le frappe sur la tête avec le marteau 
Oh, couillon ! Tu vas la fermer ta grande  
gueule une fois pour toute ! (Après quoi, il retourne travailler) 
 
LE COMTE, reprend quelques secondes plus tard 
« Où fuir dans la révolte inutile et perverse ? Je suis hanté. L'Azur !  
L'Azur ! L'Azur ! L'Azur 2 ! » 
 
 
 
SYLVESTRE, qui tient toujours le marteau en main, se rapproche du comte 
Tu vas me laisser bosser tranquillement, andouille !  
(Il s'apprête à le frapper sur la tête) 
 
MISS MARYL 
Arrêtez, pauvre abruti ! Vous allez le tuer.  
 
SYLVESTRE 
Eh bé, comme ça, ça nous fera des vacances ! 
 
MISS MARYL 
Vous pétez les plombs, mon vieux ! Reposez ce marteau,  
immédiatement ! 
 
SYLVESTRE, fait demi-tour 
Dans ce cas, je retourne au boulot. 
 
BENOÎT PICARDI, sort de la nacelle en se frottant les yeux avec les mains 
Que se passe-t-il ici ? (Il s'adresse à Sylvestre) Mais pourquoi cassez-vous de la glace de si bon matin, Monsieur Sylvestre ? 
 
SYLVESTRE 
J'ai l'intention de fabriquer un iglou. La mer s'agite beaucoup trop, ce matin. Il va falloir se mettre à l'abri de la tempête. (Il continue de taper sur le gros cube de glace avec son marteau) 
 
LE COMTE, se réveille brusquement 
Debout les amis, nous somme attaqué par la tempête ! (Il se lève et gesticule dans tous les sens) Hissez les voiles ! A tribord toute ! 
 
BENOÎT PICARDI 
Calmez-vous, Comte ! Ce n'est pas pour maintenant la tempête...Oh ! Et puis, après tout... d'ici-là... on se sera envolé dans les airs. 
 
LE COMTE 
Je vous demande pardon ? 
 
MISS MARYL 
Nous allons bientôt prendre place à bord de la « Renaissance », Monsieur le Comte ! On attend le ravitaillement. N'est-ce pas merveilleux ? Nous sommes sauvés ! Rendez-vous compte. . . 
 
LE COMTE 
Mais enfin, que me chantez-vous là ? 
 
BENOÎT PICARDI 
Bien qu'il ne faut jamais faire de pronostiques à l'avance. 
 
LE COMTE 
Mais qui êtes-vous exactement, Monsieur l'importun ?  
 
MISS MARYL 
Je vous présente, Benoît Picardi, le célèbre aérostier suisse. 
 
LE COMTE 
Mes hommages, Monsieur. 
 
BENOÎT PICARDI 
Ravi de faire votre connaissance, Monsieur le Comte Christophe Rodolphe et j'en passe de la Bouche-en-Biais ! 
 
LE COMTE 
Comment savez-vous qui je suis ? 
 
BENOÎT PICARDI 
On parle beaucoup de vous dans la « Presse People », ces temps-ci. D'ailleurs, celle-ci s'interroge beaucoup au sujet de vos déboires sentimentaux avec une certaine Lucie de Modestie. A ce propos, qu'en est-il de votre relation avec elle ? A-t-elle, oui ou non, rompu les fiançailles avec vous ? 
 
LE COMTE 
En quoi cela vous regarde-t-il ? 
 
SYLVESTRE, qui cesse de taper frapper sur le gros cube 
Vous ne devinerez jamais avec qui elle s'est cassée, cette sainte  
nitouche ? 
 
BENOÎT PICARDI 
Pour quelqu'un de plus riche que Monsieur le Comte ? 
 
SYLVESTRE 
Pas du tout ! 
 
BENOÎT PICARDI 
Pour plus pauvre ? 
 
SYLVESTRE 
Vous n'y êtes pas du tout, mon pote ! 
 
LE COMTE, s'agenouille et crie 
« Sois sage, ô ma douleur, et tiens-toi plus tranquille 3 ! » 
 
BE NOÎT PICARDI 
Voyons voir... que pouvait avoir ce Monsieur que le Comte ne possède pas ? 
 
SYLVESTRE 
C'est justement là où le bas blesse. 
 
BE NOÎT PICARDI 
Laissez-moi deviner… 
SYLVESTRE 
Si je vous dis que Lucie a viré de bord.  
 
BE NOÎT PICARDI 
Attendez voir... 
 
SYLVESTRE 
Quand je pense qu'elle a quitté Monsieur le comte pour une femme ! 
 
BE NOÎT PICARDI 
Non. 
 
SYLVESTRE 
si. 
 
BE NOÎT PICARDI 
Non. 
 
SYLVESTRE 
si.  
 
Après quoi, Sylvestre tape sur le gros cube de glace à l’aide du marteau et du burin 
 
Le Comte, se saisit de la bouteille de Champinelle et déambule sur la banquise 
« 0 triste, triste était mon âme 
A cause, à cause d'une femme.  
Je ne me suis pas consolé,  
Bien que mon coeur s'en soit allé, 
Bien que mon coeur, bien que mon âme 
Eussent fui loin de cette femme.  
Je ne me suis pas consolé,  
Bien que mon coeur s'en soit allé.  
Et mon coeur, mon coeur trop sensible  
Dit à mon âme : Est-il possible,  
Est-il possible, le fût-il,  
Ce fier exil, ce triste exil ? 
Mon âme dit à mon coeur:  
Sais-je moi même que nous vaut ce piège  
D'être présents bien qu'exilés,  
Encore que loin en allés ? » 
 
Paul Verlaine (Romance sans paroles) 
 
Le Comte reste figé, face à la mer, la bouteille de Champinelle à la main 
 
 
 
FIN DE LA SCENE 5 
 
 
 
 
 
 
 
 
ACTE 1 / SCENE 6 
 
SYLVESTRE, ROBERTO, MISS MARYL, NICKI, BENOÎT PICARDI, 
LE COMTE DE LA BOUCHE-EN-BIAIS, L’AMIRAL BYRD 
 
Nicki, pêche à la ligne. 
 
Sylvestre continue de taper sur le gros cube de glace avec son Marteau et son burin... 
 
ROBERTO, se lève, la couverture sur l'épaule 
Bonjour tout le monde ! Le vent souffle encore ce matin. Je pense qu'il va y avoir une tempête ? 
 
MISS MARYL 
Il y a de forte chance. 
 
ROBERTO, désigne le comte du doigt 
Que lui arrive-t-il ? 
 
MISS MARYL 
Il pète les plombs lui aussi. 
 
BENOÎT PICARDI, qui, entre temps, est allé chercher une bouteille thermos contenant du café 
Un café, messieurs dames ? Ca va vous réchauffer. 
 
MISS MARYL 
Dites donc, mon cher, vous êtes drôlement bien équipé. 
 
ROBERTO 
Vous n'auriez pas du thé au jasmin ? 
 
BENOÎT PICARDI  
Ce n'est pas marqué « salon de thé » sur mon front !  
 
Il sert le café à tout le monde dans un gobelet 
Le Gros cube de glace se fend en deux à ce moment-là... 
 
L’AMIRAL BYRD, qui se trouvait à l'intérieur de la glace, écarte les deux parois du cube et apparaît 
Il était grand temps que quelqu'un me libère de mon cercueil de glace ! Je commençais à me fossiliser. Je vous remercie, mon brave ! (Il sert la main à Sylvestre) Comment allez-vous ? 
 
SYLVESTRE 
J'hallucine grave ! D'où sort-il ce « gusse » ?  
 
MISS MARYL 
Amiral Byrd ! 
 
 
L’AMIRAL BYRD  
Je sais... tout le monde me croit disparu depuis six mois. (Il lui fait le baisemain) Mes hommages, mademoiselle ! 
 
MISS MARYL 
Est-ce possible ? 
 
L’AMIRAL BYRD  
Quelque chose vous étonne, semble-t-il ?  
 
BENOÎT PICARDI 
Je vous sers un café, Amiral ? 
 
L’AMIRAL BYRD, se saisit de la thermos  
Cet objet est curieux ! 
 
ROBERTO 
II s'agit d'une thermos à café, Amiral. 
 
L’AMIRAL BYRD, contemplant la thermos 
Thermos, dites-vous ?  
 
SYLVESTRE 
Du grec « thermos » : chaud. Bouteille isolante permettant à un liquide de conserver sa température pendant plusieurs heures. (Puis) c'est qu'il en a dans la tronche l'ex­ facteur ! 
 
L’AMIRAL BYRD  
Fascinant ! 
 
Le Comte, s'agenouille 
« Ô, Seigneur ! Ouvrez-moi les portes de la nuit, afin que je m'en aille et que je disparaisse 4 . 
 
C'est alors que la nuit tombe d'un seul coup. 
 
ROBERTO 
Que se passe-t-il ? On n'y voit plus rien. 
 
LE COMTE 
Le déluge ! Oh, mon dieu ! Le déluge ! 
 
SYLVESTRE 
Tu vas la fermer ta grande Bouche ! 
 
NICKI, allume la lanterne 
Nous approchons du centre de la terre, mes amis ! 
 
BENOÎT PICARDI 
Que voulez-vous dire par là, jeune homme ? 
 
LE COMTE, se déplace à genou et s'agrippe au pantalon de Benoît 
Nous nous engouffrons dans un Abîme sans fond, les amis. C’est son grand-père qui l'a dit !  
 
BENOÎT PICARDI, s'adresse à Nichi 
Nous vous écoutons, jeune homme.  
 
NICKI 
Lorsque j'étais petit, mon grand-père me parlait toujours de l'Eclipse Polaire... il disait qu'elle était un signe avant-coureur... il disait qu'il fallait s'en méfier... 
 
 
L'albatros surgit du ciel et se pose sur la banquise... 
 
 
L’ALBATROS 
« Donc, avant tout, fut Abîme; puis Terre aux larges flancs, assise sûre à jamais offerte à tous les vivants, et Amour, le plus beau parmi les dieux immortels, celui qui rompt les membres et qui, dans la poitrine de tout dieu comme de tout homme, dompte le coeur et le sage vouloir. D'Abîme naquirent Erèbe et la noire Nuit. Et de nuit, à son tour, sortirent Ether et Lumière du jour. Terre, elle, d'abord enfanta un être égal à elle-même, capable de la couvrir tout entière, Ciel étoilé, qui devait offrir aux  
dieux bienheureux une assise sûre à jamais... 
Des myriades d'étoiles apparaissent ensuite dans le ciel 
 
L’ALBATROS, poursuit  
« Nuit enfanta l'odieuse Mort, et la noire Keré, et trépas. Elle enfanta Sommeil et, avec lui, toute la race des Songes; et elle les enfanta seule, sans dormir avec personne, Nuit la ténébreuse et les hespérides, qui, au-delà de l'illustre Océan, ont soin des belles pommes d'or... 
Hésiode (Extrait des enfants de la Nuit) 
 
LE COMTE 
Le déluge, mes amis ! Oh, mon dieu ! Le déluge ! Le déluge ! 
 
Au même instant un avion passe au dessus de la banquise et largue une bouteille d'hélium qui tombe sur la tête du Comte et qui l'assomme...  
 
L'albatros s'envole... 
 
 
 
FIN DE LA SCENE 6 
 
 
 
 
 
 
 
ACTE 1 / SCENE 7 
 
SYLVESTRE, ROBERTO, MISS MARYL, NICKI, BENOÎT PICARDI, 
LE COMTE DE LA BOUCHE-EN-BIAIS, L’AMIRAL BYRD 
 
BENOÎT PICARDI, ramasse la bouteille d'hélium 
Nous allons bientôt décoller, les amis; préparez-vous à embarquer à bord de la « Renaissance » ! 
 
SYLVESTRE 
Un coup de main, beau gosse ? 
 
BENOÎT PICARDI, le prend par le bras et l'entraîne vers la nacelle 
Je vais avoir effectivement besoin de vos biceps, Sylvestre. Pendant que je gonflerai le ballon à l'hélium dans la nacelle, vous maintiendrez à bout de bras la corde d'amarrage. (Il lui remet la corde) Et surtout, ne la lâchez pas !  
 
SYLVESTRE 
Pas de problème, Boss ! 
 
NICKI, pointe son nez dans le ciel 
« Les étoiles familières de nos latitudes penchent, penchent sur le ciel ! L'étoile Polaire descend de plus en plus sur l'horizon nord; Orion, ma constellation, est au Zénith; la voie Lactée, comme une fente lumineuse, s'élargit chaque nuit; le Chariot est une petite brume; le sud est de plus en plus en noir devant nous. Pour me faire patienter, Vénus a doublé de grandeur et quintuplé d'éclat; comme la lune, elle fait une traînée sur la mer... » Blaise Cendrars (Extrait de Nuits étoilées) 
 
ROBERTO, le nez pointé dans le ciel 
Quel ravissant spectacle ! 
 
L’AMIRAL BYRD, s'adresse à Nicki 
Quelque chose me chiffonne, jeune homme : vous parlez comme si nous étions au Pôle Nord. 
 
MISS MARYL 
II se trouve que nous nous trouvons dans l'Arctique, Amiral Byrd !  
 
L’AMIRAL BYRD  
Comme c'est curieux ! Ma base météorologique se situait dans l'Antarctique lorsque je l'ai quittée voilà six mois. 
 
ROBERTO 
Le Pôle Sud est à l'opposé, Amiral. 
 
MISS MARYL, tape sur l'épaule de l'Amiral 
Vous n'êtes pas au bout de vos surprises, mon cher. 
 
L’AMIRAL BYRD  
Vraiment ? 
 
MISS MARYL 
Et puis, qu'est-ce qui vous fait dire que votre voyage a duré six mois ? 
 
L’AMIRAL BYRD  
Que ce soit au Pôle Sud ou bien au Pôle Nord, les journées sont extrêmement courtes à la fin de l'automne; et c'est le cas en ce moment. C'est pourquoi, si mes calculs sont bons, ayant quitté ma base en mai dernier, je peux facilement en déduire que j'ai navigué six mois. Cependant, je ne comprends pas ce que je fais au Pôle Nord, compte tenu que je devrais être au Pôle Sud. 
 
NICKI 
Les courants magnétiques du Pôle Sud vous ont entraînés ici, Amiral. 
 
L’AMIRAL BYRD  
C'est impossible, jeune homme, car une fois atteint le centre de l'Antarctique, j'aurais dû logiquement faire marche arrière poussé par le reflux. 
 
LE COMTE 
II n'y a pas de flux et de reflux possible lorsqu'on se dirige dans un gouffre, et ce, quelques soient les pôles, cher Monsieur. 
 
L’AMIRAL BYRD  
A qui ai-je l'honneur ? 
 
LE COMTE 
Christophe Rodolphe David Charles Henri René Christian­ Bernard Ange de la Bouche-En-Biais, Comte de Maison-du-Bois Doré !  
 
L’AMIRAL BYRD  
Je le connais, celui-là. Ce ne peut-être vous. 
 
LE COMTE 
Traitez-moi d'usurpateur.  
 
L’AMIRAL BYRD 
Charles Henri ne porte pas autant de patronymes.  
 
LE COMTE 
J'exige des excuses, Monsieur l'Amiral ! 
 
MISS MARYL 
II y a un malentendu, Monsieur le Comte; l'Amiral.Byrd faisait allusion à votre grand-père. 
 
L’AMIRAL BYRD  
Charles Henri et moi avons célébré le Nouvel An dernier aux folies bergères. 
 
LE COMTE 
Vous vous moquez de moi ou quoi ? Mon grand-père est décédé depuis des lustres. 
 
SYLVESTRE, qui tient la corde d'amarrage en main, s'adresse au Comte 
Ferme ta grande gueule, Abruti ! 
 
LE COMTE 
Eh bien, soit ! 
 
Pendant ce temps-là, Benoît gonfle la montgolfière... 
 
L’AMIRAL BYRD, s'adresse à Miss Maryl 
Je vous assure que cet homme est un usurpateur. 
 
MISS MARYL 
Vous faisiez allusion au « Nouvel An 34 », mon Amiral ? C'est bien cela ? 
 
L’AMIRAL BYRD  
Exactement ! 
 
ROBERTO 
Sans vouloir vous offenser, Amiral, je tiens à vous préciser que nous sommes au vingt-et-unième siècle. 
 
L’AMIRAL BYRD  
C'est une plaisanterie ? 
 
MISS MARYL 
L'humanité entière a fêté le « Millenium » tout récemment. 
 
L’AMIRAL BYRD  
Ne me dites pas que j'ai hiberné près d'un siècle dans mon cercueil de glace ? 
 
ROBERTO 
J'en ai bien peur. 
 
L’AMIRAL BYRD  
J'ai donc perdu la notion du temps. 
 
MISS MARYL 
Vous êtes un spécimen rarissime, mon cher Amiral ! Les scientifiques du monde entier vont s'intéresser à vous, ainsi que la presse... 
 
L’AMIRAL BYRD  
Je regrette, ma chère, mais je ne suis pas un cobaye. Quant aux honneurs, je m'en contrefiche ! Je préfère l'anonymat, comprenez-vous ? 
 
ROBERTO 
Pas vraiment ? 
 
L’AMIRAL BYRD  
Voyez-vous, mes amis, la solitude est devenue ma seule compagne. 
 
C'est alors que l'orage gronde...  
 
A présent, la montgolfière est gonflée... 
 
BENOÎT PICARDI, qui est placé dans la nacelle 
Embarquement immédiat ! Dépêchez-vous, les amis, la tempête menace ! 
 
Sylvestre tient toujours la corde d'amarrage avec les deux mains. 
ROBERTO, prend l'Amiral Byrd par le bras 
Allons-y, Amiral Byrd ! 
 
LE COMTE 
Un instant, Amiral ! (Il prend l'Amiral Byrd par le col) J'exige des excuses sur le champ ! 
 
MISS MARYL, s'adresse au Comte 
Lâchez-le ! 
 
ROBERTO 
Ne faites pas l'abruti, Monsieur le Comte !  
L'orage gronde terriblement...  
Nicki se jette à l'eau sans que quiconque ne s’en aperçoive. 
Le vent souffle de plus en plus fort... 
 
LE COMTE, tient toujours l'Amiral Byrd par le col 
Eh bien, j'attends, Monsieur ! 
L’AMIRAL BYRD  
Vous n'êtes qu'un usurpateur ! 
 
LE COMTE, l'étrangle 
« O, rage et désespoir ! » 
 Le vent souffle de plus en plus fort...  
La mer s'agite violemment... 
SYLVESTRE, lâche la corde d'amarrage, retrousse ses manches, se dirige vers le Comte et l'intercepte par le bras 
Tu commences à me saouler, andouille ! Tu vas la fermer ta grande gueule ! 
 
La montgolfière s'envole aussitôt avec Benoît Picardi à son bord... 
 
LE COMTE 
Je ne vous autorise pas à me parler sur ce ton, facteur. 
 
SYLVESTRE 
Cause toujours, Majesté ! 
 
LE COMTE 
Je vous ordonne de me lâcher, facteur ! 
 
SYLVESTRE, lui décroche une droite 
Tu es bouché ou quoi ? Ex facteur !  
 
BENOÎT PICARDI, s'envole à bord de la « Renaissance » 
Je regrette, les amis, je ne peux pas redescendre ! Adieu ! Mille fois merci pour tout ! 
 
ROBERTO 
Oh, mon dieu, il s'est envolé sans nous ! 
 
MISS MARYL 
Oh, mon dieu, mon dieu, mon dieu, mon dieu ! ! ! 
Soudain, la banquise où repose nos amis est entraînée dans un énorme tourbillon... 
 
SYLVESTRE 
Que se passe-t-il ? 
 
L’AMIRAL BYRD  
Fantastique ! Nous sommes au centre de la terre. 
 
LE COMTE, plonge dans les bras de Roberto 
Oh, mon dieu, mon dieu, mon dieu ! ! Qu’allons-nous devenir ? 
 
MISS MARYL 
Où est passé Nicki ? 
 
LE COMTE 
il est allé rejoindre son grand-père.  
 
Puis la banquise disparaît, aspirée au fond d'une cuvette... 
 
FIN DE LA SCENE 7 
 
 
 
FIN DE L’ACTE 1 
 
 
 
 
 
 
EPILOGUE 
 
MISS MARYL, ROBERTO, L’AMIRAL BYRD, SYLVESTRE, 
LE COMTE, LA VOIX (dans le haut-parleur) 
 
Quelques temps plus tard dans l'Antarctique (Pôle Sud), en pleine tempête...  
 
La banquise où repose nos amis est projetée d'un puissant tourbillon...  
 
Peu après, le temps se calme...  
 
Le ciel s'éclaircit...  
 
Puis le soleil brille...  
 
Tout le monde est allongé... 
 
LE COMTE, se réveille 
Dieu soit loué, nous sommes sauvés ! Dieu soit loué ! 
 
SYLVESTRE, se réveille 
Décidément, tu ne la fermeras jamais, Charles Henri et j'en passe ! 
 
Soudain, la sirène d'un navire retentit au loin... 
 
LE COMTE, bondit sur place 
Un navire à l'horizon ! Debout, mes amis ! Réveillez-vous ! (Il fait de grands gestes) Ohé ! Ohé ! je suis là ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! Ohé ! 
 
La sirène du navire retentit toujours... 
 
MISS MARYL et ROBERTO, se lèvent 
Ohé ! Ohé !Ohé ! Ohé ! Ohé !Ohé ! Par ici ! Par ici ! 
 
LE COMTE, s'agenouille et lève les bras en l'air 
Merci Seigneur de nous l'avoir envoyé ! Merci Seigneur ! Merci, merci, merci ! ! ! 
 
MISS MARYL, réveille l'Amiral Byrd en le secouant 
Réveillez-vous, Amiral Byrd, un navire vient à notre rescousse ! 
 
La sirène du navire cesse de retentir. 
 
LA VOIX (dans le haut-parleur) 
Vous êtes dans les eaux territoriales de l'Antarctique... je répète... vous êtes dans les eaux territoriales de l'Antarctique... nous venons à votre secours... je répète...nous venons à votre secours...  
 
MISS MARYL 
Je ne comprends pas, que faisons-nous dans le pôle Sud ? 
 
ROBERTO 
Va savoir... ? 
 
L’AMIRAL BYRD 
La solitude va me manquer, les amis. 
 
ROBERTO 
Comment ? Vous n'êtes pas ravi de retourner dans le monde, Amiral Byrd ? 
 
L’AMIRAL BYRD 
Vous ne pouvez pas savoir le plaisir que j'ai éprouvé pendant près d'un siècle à vivre pleinement la solitude, d'être livré à moi-même, de savourer la paix et la tranquillité, assez longtemps pour découvrir l'étendue réelle de leurs vertus : «  Je m'étais arrêté pour écouter le silence; le jour mourait, la nuit naissait, mais dans une paix infinie. Il y avait là des processus impondérables et des forces du cosmos, dans un silence harmonieux. L'harmonie, c'était bien cela ! Voilà ce qui surgissait du silence: un doux rythme, les échos d'un accord parfait, était-ce la musique des sphères ? Il me suffisait de saisir ce rythme, d'en faire moi-même partie, momentanément. En cet instant, je n'eus pas le moindre doute du fait que l'homme ne faisait qu'un avec l'Univers. La conviction me vint que ce rythme était trop bien ordonné, trop harmonieux, trop parfait pour être le résultat d'un hasard aveugle, qu'il devait donc y avoir un sens à tout cela et que l'homme faisait partie de ce tout et n'était pas un simple caprice de la nature. C'était une sensation qui transcendait la raison, qui s'insérait jusqu'au coeur du désespoir de l'homme et le trouvait sans fondement. L' univers était un cosmos, pas un chaos ; l'homme faisait partie de ce cosmos aussi légitimement que le jour et la nuit. Je remportai effectivement avec moi quelque chose que je n'avais pas pleinement possédé auparavant : l'appréciation de la beauté pure, du miracle d'être vivant, ainsi qu'un humble ensemble de valeur. . . »  
 
FIN DE L’EPILOGUE 
 
FIN DE L’EPISODE 
 
 
 
 
 
 

(c) emilien casali - Créé à l'aide de Populus.
Modifié en dernier lieu le 17.03.2021
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